DEMOCRATIE PARTICIPATIVE ET DELIBERATIVE
De quoi s’agit-il ?
La république monarchique, dans laquelle nous vivons depuis 1958, fait la part belle à « la démocratie représentative », que nous pourrions plus surement baptiser « la délégation de pouvoir ». Selon des règles presque immuables, les citoyens, électeurs-consommateurs, sont appelés aux urnes pour désigner un homme, quelquefois affublé d’une équipe lige, pour une durée déterminée pendant laquelle il exerce le pouvoir presque sans partage, ni remise en cause.
Le pouvoir politique, comme celui de l’argent, ouvre des appétits et donne tellement goût à ceux qui l’exercent, qu’ils accumulent les mandats dans le temps, et les empilent simultanément, prétendant exercer des fonctions très souvent incompatibles entre elles, ne serait-ce que par manque de temps utile.
Cette dérive de la république, n’a comme seule vertu que de ne pas remettre fondamentalement en question le pouvoir du capitalisme financiarisé. Mieux même, elle le renforce et contribue à l’approfondissement de la crise démocratique dans laquelle elle nous a précipités. Au point d’avoir donné naissance et amplifié la détestation des hommes politiques, devenus dans l’expression populaire des politiciens, voir des politicards.
Dans le même temps, refusant d’assumer leurs responsabilités, ou cherchant à se refaire une virginité, de nombreux hommes politiques se présentent au suffrage des électeurs, en se cachant derrière un nom d’emprunt, celui d’une association éphémère souvent, et renient leur appartenance à une organisation, à un parti politique ou un groupe de pensées.
Le plus souvent ils se disent apolitiques. Alors qu’en fait ce sont des hommes de droite, bien ancrés à droite. On doit à cette lâcheté ou volonté d’enfumage, par exemple d’avoir vu apparaître sur l’échiquier politique un étrange objet, « le Centre », artifice né bien longtemps après la révolution de 1789. Cette tendance a gagné les esprits : signe des temps, mais aussi preuve de faiblesse. Nombreux sont ceux qui, hier encore, clamaient haut et fort leur appartenance à une organisation, se rendent au combat, le drapeau dans la poche, aujourd’hui.
Dans ce rejet globalisé de la politique et des hommes qui en font profession, on y mêle généreusement les gens honnêtes – une grande majorité – et les politiciens véreux. La référence à une pseudo vie associative est devenue la panacée. L’idéologie dominante de la classe au pouvoir, les grands capitalistes, est en train de gagner la guerre des esprits.
Aujourd’hui il n’y aurait plus place que pour des gens issus de « la société civile », seuls à ne pas être suspects de vouloir faire carrière en politique et de ne pas gruger leurs contemporains. En tentant de remplacer des hommes de conviction par des techniciens, le pouvoir conservateur cadenasse les institutions les rendant hermétiques à la grande masse des citoyens, et les éloigne ainsi du peuple.
La question qui nous est posée à (presque) tous, ce n’est pas de trouver une recette miracle, mais bien quelle remise en cause de l’organisation sociale pour replacer le citoyen au sein même de la vie démocratique.
Les élections locales sont propices à poser des questions aux élus sortants. La proximité y aide, d’autant que pour une grande part ils se sont transformés en « nobliaux de bazar », exercent les fonctions qui leur ont été confiées, comme si elles leur appartenaient indéfiniment, sans partage, et sans rendre réellement compte de leurs actes. C’est ainsi qu’ils peuvent endetter impunément une collectivité, en prétextant l’intérêt général, et décider de transformations irréversibles du territoire sans jamais avoir consulté la population. A leur départ, il faudra gérer leurs égarements.
Pour autant, les réponses apportées parfois, par les candidats à leur succession en général, sont pour le moins empruntées, souvent floues, et rarement construites sur une conviction : celle de faire vivre une démocratie locale de nature à remettre en question l’ordre établi.
On voit alors fleurir des propositions, dont le caractère réduit révèle toutes les concessions faites à ceux que la perspective du bouleversement nécessaire inquiète. Et les quelques bonnes intentions affichées disparaissent vite dans la gestion de l’existant, faute d’avoir pris le temps de réfléchir aux moyens pour opérer de tels changements dans la vie de la cité.
La participation des citoyens à la prise des décisions dans la commune, le département, … et au-delà, ne peut pas se décréter. Elle s’organise, avec et pour les citoyens. Aucun programme de gestion des affaires publiques, aussi ambitieux puisse-t-il paraître, ne remplacera cette construction de tous pour tous. De même, c’est la raison pour laquelle il est vain de déclarer que des instances locales fonctionneront bien chez nous, parce qu’à l’œuvre chez d’autres cela parait juste et approprié.
Alors que faire ? Mettre en débat cette question, en se gardant bien des idées toutes faites, prédigérées, et en se refusant d’y faire adhérer tous les autres aveuglément.
Le fonctionnement des institutions pose une série de problèmes, dont les réponses ne sont pas univoques.
A ce propos, la disponibilité du citoyen pour sa participation à la prise des décisions et sa candidature éventuelle à l’exécutif, n’en est pas le moindre. A y regarder de plus près, ce n’est pas le fruit du hasard si la carrière politicienne regorge de certaines catégories de la société, qui disposent du temps, peu ou plus contraintes par l’exercice d’une activité professionnelle, et surtout moins exposées à l’exploitation et aux exploiteurs.
Mais peuvent également s’inviter au débat, la confusion ou pas entre les organes de décision et l’exécutif. Ou pourquoi pas les modes de désignation – choix, tirage au sort, … – des représentants du peuple.
Mon propos vise ici à mentionner quelques éléments de la réflexion pour faire sauter l’ordre établi, et me déclarer disponible pour toutes celles et tous ceux pour qui construire n’est pas de chausser les pantoufles du prédécesseur, même si la volonté est de faire mieux. Pas plus que de remplacer une dictature du bonheur pour tous, bon gré mal gré, par une autre pensée tout aussi uniforme.